“On assiste aujourd’hui à un changement de paradigme dans l’industrie de la défense”. Pour Olivia Noirot-Nérin, directrice d’investissement en dette corporate chez Sienna IM, l’Europe est sortie de l’ère des dividendes de la paix, et, face à la baisse constante des dépenses de défense des États depuis la fin de la guerre froide, financer l’industrie de la défense apparaît comme une nécessité. Dans un monde où la Chine et la Russie consacrent une part exponentielle de leurs PIB à l’armement, et où les terrains d’affrontement se multiplient, les industriels de la BITD, habitués jusqu’ici au temps long, doivent s’adapter et produire dans l’urgence.
Monter en cadence dans un secteur habitué au temps long
Pour autant, un pays comme la France, très volontariste depuis peu, se donne-t-il les moyens de répondre à ces nouveaux enjeux ? La prise de conscience est une chose, mais la montée en cadence de l’outil productif en est une autre, et dans ce domaine, le temps de latence est parfois important. Une limite que confirme Alexandre Celier, PDG d’Armisia Group, une PME spécialisée dans l’outillage mécanique destiné à l’aéronautique qui réalise 12 % de son chiffre d’affaires dans la défense. À l’heure actuelle, témoigne-t-il, il peut se passer 10 ans entre la commande d’un Rafale et sa livraison, même le premier paiement du client peut mettre des années à arriver ou simplement être décalé pour des raisons budgétaires…. Des délais aggravés par les goulots d’étranglements au sein de l’écosystème des PME-ETI de la défense en France. Il suffit d’un “mauvais élève” au sein de la chaîne, pour que toute la production soit bridée. Alexandre Celier cite cette fois l’exemple de l’aéronautique civile, dont la production d’avions est actuellement ainsi limitée.